« Faut qu’on serve » : la conserverie mobile et solidaire de la Drôme

publié le 13 septembre 2018
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Sommaire de la fiche :
Résumé

C’est quoi l’idée ?

Sur le territoire maraîcher et fruitier qu’est la Drôme, l’idée de la conserverie mobile et solidaire est née de l’envie d’un collectif d’habitant.e.s de manger sain et pas cher.

Dans le cadre d’un projet coopératif, les 3 centres sociaux de la ville de Romans facilitent l’accessibilité à une alimentation saine et locale des familles, en particulier celles en situation de précarité.

Le projet de conserverie mobile et solidaire est développé à l’aide d’un véhicule équipé et il s’agit de :

– récupérer et valoriser les fruits et légumes de qualité, disqualifiés ou en surplus produits par des agriculteurs de la filière circuits courts du territoire rural et agricole de l’agglomération,

– et dans le même temps permettre aux habitants de les cuisiner et de les transformer sous forme de conserve.

 

L'action en images

Quelle est la situation de départ qui a motivé le projet ?

Depuis longtemps préoccupées par la question de l’alimentation, ce projet a émergé il y a deux ans,  lorsque la maison de quartier des Ors, de Saint Nicolas et la maison citoyenne, regroupées en coopérative, ont animé une quinzaine de tables de quartier dans le cadre du renouvellement de leur projet social. « Manger bien et pas cher, voilà ce que souhaitait les habitants de Romans, » détaille Jean-Marc Noirault, directeur de la maison de quartier des Ors. Il faut dire que la Drôme – ou « le verger de la France » comme il l’appelle – est un territoire très maraicher et fruitier et aussi le premier département bio de France.

Le groupe projet alimentation des trois maisons de quartier, composé d’une quinzaine de bénévoles et de professionnels, ont travaillé sur les grandes lignes de l’action. Le groupe est parti à Liège, s’inspirer de l’expérience de la conserverie solidaire itinérante de nos voisins belges. L’idée: être mobile pour aller à la rencontre des producteurs, mêmes des plus petits qui ne peuvent pas se déplacer pour quelques tomates invendues. Et aussi permettre aux habitant.e.s de découvrir leur territoire et rendre vivant le concept de production locale !

Qu'avez-vous mis en place ?

Comment ça marche ?

Les animations proposées ont pour objectif la sensibilisation des publics à une alimentation saine et locale à partir d’un équipement attrayant visuellement et apportant un coté convivial.

Le camion-cuisine, sorti de l’usine en septembre 2017, est installé dans un espace public, quartiers ou places de villages, à l’occasion ou lors des marchés ou d’événements existants, afin de proposer des ateliers de transformation en direct avec les habitants, de confectionner des recettes et de proposer ces produits à la consommation sur place ou à emporter. Il s’agit de cuisiner et transformer les fruits et légumes produits à proximité et de préférence de valoriser les surplus agricoles et les productions disqualifiées (calibre, esthétique).

Les conserves réalisées sont pour une partie cédées aux personnes participant à leur confection, sur la base du coût de la consigne d’un bocal en verre (donc réutilisable) équivalent à 2 euros,  l’autre partie est « vendue » dans les trois centres pour l’instant en « tic tac, » la monnaie-temps locale. Une minute d’investissement au centre correspond à un tic tac.

Quelles ont été les étapes clés du projet ?

  • 2015
    6 mois
    Une idée qui germe

    Réflexion d’un collectif d’une vingtaine d’habitants de la maison de quartier des Ors suite à l’arrêt de la cuisine centrale pour nourrir les enfants de l'accueil de loisirs. La livraison de plateaux repas sous vide aux enfants ne satisfait pas les familles et l'association et un "comment ?" émerge.

  • 2016
    1 an
    Un besoin social

    Suite aux débats publics sur l'alimentation, des constats et des problématiques sont partagés collectivement : problèmes de santé, manque d'information, gaspillage, pédagogie du Bio,...
    Une étude de marché quantifie les besoins et attentes des acteurs (habitants et producteurs), estime les possibilités offertes par la production existante (surplus, invendables...) : les conditions d'une faisabilité économique et sociale sont estimées. La fabrication de conserves est identifiée comme solution par 2 parties : par les habitants et les producteurs (56 proches de la Ville) qui cherchent à transformer leur surplus.
    L'alimentation devient une thématique prioritaire pour la Coopération.

  • 2017
    1 an
    Convergences

    Des actions du "bien manger" en développement dans les 3 associations, orientées vers une alimentation saine et respectueuse de l'environnement : confection de repas économiques et locaux, ateliers santé, ateliers de cuisine, 4 jardins partagés...
    Le groupe projet Alimentation (18 habitants, 4 salariés) se formalise sur les actions coopératives. L'action Conserverie mobile s'éveille comme action réalisable et inspirante !
    Valence Romans Agglo conduit une stratégie alimentaire, promeut les producteurs locaux, la consommation en circuits courts et les principes de transformation des fruits et des légumes du territoire. Elle soutient les démarches et ateliers de sensibilisation qu'animent avec et vers les habitants des 3 maisons de quartier.
    Un programme LEADER débute sur le même territoire, et ce projet rejoint leurs objectifs "accompagner les acteurs vers une démarche d'alimentation locale de qualité pour favoriser une alimentation saine pour tous".
    Un partenariat avec l'association Agricourt s'ouvre sur l'accompagnement de l'ensemble des actions.
    Sept : commande et réalisation du véhicule équipé par la SERT
    Oct. : présentation du véhicule et du projet aux élus territoriaux et aux habitants (Foire du Dauphiné et anniversaire des 30 ans du groupe Archer)
    Nov. : semaine test d'animations dans quelques communes et à Romans, pendant "Terres Animées" par Valence Romans Agglo. Inauguration officielle de la conserverie le 22 novembre en présence de 80 personnes.
    Déc : contact avec les communes pour planifier les interventions et réalisation d'une formation de conserveur par le CTCPA pour valider nos barèmes de recettes.

  • 2018
    6 mois
    Expérimentation

    1 à 2 animations par semaine, avec une montée en charge à partir d'avril-mai, pour tenir compte du rythme des productions. Travail adapté de mobilisation des populations ciblées (situation de précarité économique, alimentaire et isolement).
    Juin : évaluation partagée du processus avec des habitants, des producteurs, des collectivités territoriales, mesure de l'impact social de la conserverie et des modes de consommation du groupe test, avancées des réflexions sur le modèle économique.
    Ajustement du mode opératoire : cueillette, animation, transformation, distribution, sensibilisation, mobilisation selon les constats faits lors des 1er mois.

  • 2018
    6 mois
    Propulsion !

    Juillet-septembre : temps forts d'animation et de transformation en raison des productions plus abondantes à cette période et aussi test de prestations à façon pour les producteurs (coulis, ratatouille, jus, confiture...). Montée en charge des animations, mobilisations
    Oct-nov.: poursuite des animations à un rythme moins soutenu et démarrage des confections de soupe.
    Capitalisation et modélisation
    Déc : évaluation partagée du processus avec des habitants, des producteurs, des collectivités territoriales, mesure de l'impact social et résultat du groupe-test, conclusion sur un possible modèle économique.

  • 2019
    1 an
    Consolidation

    Exploitation des conclusions d'une année de fonctionnement pour envisager la poursuite du projet, tant sur les modalités de collecte que d’animations.

    Prise en compte des éléments de l’étude sur le modèle économique et amorce de la construction d’un mode de gestion coopératif avec la diversification de productions et de travail à façon avec les producteurs locaux

    Transférabilité à d’autres territoires : accueil, animation, transmission des modes de travail, des techniques d’utilisation du camion …

Quels moyens ont été mis en oeuvre ?

Mise en place des équipes et rôle de chacun

Une quinzaine d’habitants mobilisées dans le groupe projet et une vingtaine de bénévoles dans l’action de conserverie

Les 3 directeur.rice.s des 3 maisons de quartier

1 coordinatrice du projet (0,5 ETP)

1 chargée de mission sur l’étude de l’impact social (0,1 ETP)

3 animatrices (0,3 ETP)

1 professionnel de la conserve (à venir, fin 2018 – 0.6 ETP)

Mise en place des moyens logistiques et financiers

La « Conserverie mobile » représente un investissement d’environ 55 000 euros TTC et un coût annuel de fonctionnement d’environ 45 000 euros pour lesquels « la Coopération des 3 centres sociaux de Romans » a bénéficié de plusieurs soutiens financiers :

  • Initiactive 2607
  • La Fondation Caisse d’Épargne Loire Drôme Ardèche
  • Le programme européen de développement rural LEADER LEADER
  • La Fondation Louis Bonduelle
  • CRÉAVENIR La Fondation d’entreprise du groupe Crédit Mutuel Dauphiné-Vivarais, Créavenir

Place des partenaires et du centre social dans le projet

La SERT à Romans Spécialisée dans la fabrication de matériels mobiles, la SERT s’est engagée dans le projet en concevant et construisant le véhicule qui héberge la Conserverie. Grâce à son savoir-faire, l’entreprise a su répondre à nos spécificités en matière de maniabilité, d’autonomie et d’équipement du camion cuisine tout en s’adaptant à nos contraintes économiques.

Valence Romans Agglo « La Coopération des 3 centres sociaux » est en lien avec Valence Romans Agglo au titre du projet alimentaire du territoire, notamment son action d’accompagnement et de promotion des circuits courts locaux ainsi que sa mobilisation autour de l’information, sensibilisation des habitants. Le succès de la Conserverie pourrait en effet ajouter au rayonnement du territoire.

Arche Agglo La fusion des communautés de communes Communautés de communes Hermitage-Tournonais, Pays de l’Herbasse et Pays de Saint-Félicien … soutient la conserverie mobile et solidaire au titre de la promotion du territoire et des liens ville-campagne. Elle porte aussi le programme Leader.

 

En conclusion

Quel(s) résultat(s) de l'action ?

Le processus évaluatif est mené de façon participative afin que la démarche soit appropriée et que ses résultats soient utilisés. La fleur de l’utilité sociale, outil socle de l’évaluation, a ainsi été imaginée avec les administrateurs, puis affinée avec les salariés et les habitants. Cet outil co-construit définit la grille de lecture de 6 dimensions permettant de guider le recueil de données des actions coopératives conduites.

Extrait des productions des habitants sur le projet de conserverie mobile et solidaire lors de l’Agora du 9 novembre 2017 : « En quoi l’action de conserverie mobile et solidaire contribue à la dimension … ? ». (Voir  fiche d’évaluation dans la partie document)

  • Contribution à la richesse, notamment à travers la culture et l’emploi :

    La contribution à la richesse passe tout d’abord par la valorisation du travail dans ses diverses formes, en l’occurrence le travail paysan local et le travail bénévole (qui est visibilisé via la communication de la Coopération, mais aussi comptabilisé et rétribué grâce à une monnaie temps).

    La richesse est également culturelle et l’appréciation des différences de chacun se fait ici via la cuisine et l’échange de recettes. « Quand on cuisine ensemble, on voyage ! »

    Enfin, la contribution à la richesse peut également être économique, avec par exemple la potentialité de création d’emplois, d’un modèle économique pour la Conserverie mobile et solidaire, ou encore la possible duplication de l’outil.

  • Valorisation et respect de l’environnement et des biens communs :

    La Conserverie promeut des pratiques et de gestes plus respectueux de l’environnement (lutte contre le gaspillage alimentaire par le réemploi des surplus de fruits et légumes, promotion d’une alimentation saine, locale et durable). Prendre part au projet permet d’acquérir une meilleure connaissance des enjeux liés à l’environnement, avec notamment la reconnaissance des métiers du maraichage. « On promeut le rythme de saison (manger, récolter, conserver …) »

  • Reconnaissance des personnes, affirmation de soi et pouvoir d’agir :

    Pour les individus, prendre part à la Conserverie est une prise de risque, qui suscite la fierté. Par exemple, cet aspect est ressorti avec le fait de devoir prendre la parole devant un public inconnu, notamment pour expliquer le projet à des personnes qui ne le connaissent pas (parfois même à la presse), synonyme d’un gain en estime de soi. « Je suis curieuse mais jamais je n’aurais pensé apprendre à faire des conserves »

    La participation au projet de Conserverie permet une montée en compétences :

    – Des compétences génériques (prise de parole, écoute, implication au sein d’un groupe, participation à la prise de décision, etc.) acquises sur les actions et au sein du groupe projet alimentation.

    – Des compétences techniques : 4 salariées et 3 habitants ont ainsi suivi une formation CTCPA, et forment en retour les habitants à la confection de conserves.

 

L'action va-t-elle se poursuivre ?

Oui, elle se poursuit jusqu’en 2021.

L’année 2019 va être structurée autour de la production de travail à façon (relation de travail qui voit un agriculteur, propriétaire de son outil de production, produire des marchandises sur les ordres d’un marchand qui se charge de leur commercialisation) en lien avec les producteurs locaux. Cela permettra une diversification des activités.

Aussi, des formations élargies d’utilisation du camion auprès des adhérents vont être mises en place.

Les prestations auprès des collectivités et des entreprises vont être développées.

Des études sont en cours pour développer l’action sous forme de restauration auprès des étudiants 🙂

 

Quelles améliorations souhaiteriez-vous apporter au projet ?

Avoir un autoclave de capacité plus importante. La possibilité de productions de conserves est importante.

Quels conseils donneriez-vous à des personnes qui voudraient suivre vos traces ?

Venez nous rencontrer 🙂 ! Et on en discute !

Commentaires
1 commentaire sur “« Faut qu’on serve » : la conserverie mobile et solidaire de la Drôme”
  1. Chantal GONDOUIN dit :

    Bonjour,
    J’ai découvert la conserverie mobile et solidaire de la Drome dans un article d »alternatives économiques » paru en novembre.
    Je trouve cette idée très belle et je me demande si elle pourrait être adaptable sur un territoire davantage urbain.
    J’habite dans les Bouches du Rhône et je me sens concernée par la difficulté de certaines personnes à se nourrir correctement et le gaspillage alimentaire qui existe par ailleurs.
    Seriez vous prêt à échanger sur votre expérience ? Même si ce concept ne peut s’appliquer à l’identique, il pourrait peut être se décliner avec quelques adaptations.
    Je vous remercie pour votre réponse

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